1. Florian Noack
12 Etudes Transcendantes de Liapounov
Florian Noack, piano
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12 Etudes Transcendantes
1. Berceuse
2. Rondes des Fantômes
3. Carillon
4. Térek
5. Nuit d’Eté
6. Tempête
7. Idylle
8. Chant Épique
9. Harpes Éoliennes
10. Lesghinka
11. Rondo des Sylphes
12. Elégie en Mémoire de François Liszt
Les œuvres de Serge Liapounov sont rarement données en concert. Pourquoi? Pour la raison simple que elles sont extrêmement difficiles à jouer. Le compositeur était lui-même un brillant concertiste.
Florian Noack est totalement armé pour pleinement interpréter l’œuvre pour piano de Liapounov: l’intensité rythmique, un son magnifique, et bien sûr une vraie virtuosité.La musique de Liapounov est trop méconnue. C’est une grande nouvelle que ce pianiste ait décidé d’y consacrer plusieurs enregistrements. - Commentaires sur Amazon
Quand et comment avez-vous découvert la musique de Lyapunov et qu’avez-vous particulièrement animé dans celle-ci ?
J’ai découvert Lyapunov (ou Liapounov), ainsi beaucoup d’autres compositeurs peu connus, par le biais du Dictionnaire de la musique pour piano de Guy Sacre – qui a très amicalement accepté de rédiger le livret de mon CD. Aujourd’hui, les quelques œuvres parfois défendues par les pianistes en concerts ou en concours sont les 12 Etudes Transcendantes de Liapounov. C’est donc par là que, vers 14 ans, j’ai commencé à découvrir cette musique. La première chose qui m’a frappée, dans les œuvres de Liapounov, c’est sa séduction pianistique immédiate. L’écrite est ciselée, colorée, souvent extrêmement virtuose, idéalement adaptée au piano. Un autre aspect typique (notamment au niveau de l’harmonie) est son inspiration russe et souvent caucasienne, qui le rapproche très fort du Groupe des Cinq, et principalement de Balakirev. Ce qui me plait personnellement tout particulièrement dans la musique de Liapounov, c’est son lyrisme - simple et émouvant, avec une sorte de discrétion et de pudeur qui lui sont propres.
Il a souvent été reproché à Liapounov l’absence de style personnel , qu’en pensez vous plus particulièrement par rapport à celle de son contemporain russe comme lui Balakirev dont il partage l’obsession pour la tonalité ré majeur / si mineur ainsi que ré b major / si b mineur ?
Il est indéniable que Liapounov a été énormément influencé par Balakirev, qui était son mentor et son ami. Entre parenthèse, il n’était pas le seul, car des compositeurs comme Tchaïkovsky et Rimsky-Korsakov faisaient également corriger leurs œuvres par Balakirev, à tel point que Tchaïkovsky a écrit 3 versions de son Ouverture Roméo & Juliette (d’après les corrections de Balakirev) et que Rimsky-Korsakov avouait parvenir difficilement à résister à cette sorte d’influence tyrannique.
Cela se confirme tout particulièrement dans les œuvres que j’ai choisi d’enregistrer.
Les 8 Mazurkas de Liapounov font directement écho aux 7 Mazurkas de Balakirev. Dans les dimensions : certaines pièces atteignent les 8 minutes (alors qu’une Mazurka de Chopin ou de Scriabine reste généralement dans le cadre de la miniature). Dans l’écriture pianistique : il s’agit d’œuvres de concert, ambitieuses, virtuoses (les octaves et doubles notes y sont fréquentes !). Enfin, dans l’harmonisation, qui, chez Balakirev comme chez Liapounov, confère toujours un côté légèrement plus oriental à leur musique.
La redoutable Tarentelle Op.25 en si b mineur est un écho direct de la Tarentelle de Balakirev en si majeur (et, à plusieurs endroits, fait songer logiquement à Islamey).
Dans plusieurs pièces néanmoins, on remarquera chez Liapounov une sensibilité plus poétique, plus réservée –un tempérament moins exacerbé que celui de Balakirev. Il y a là bien plus qu’un simple remake , et d’ailleurs il n’était pas rare qu’à son tour, Liapounov influence lui-même son mentor.
Il y a plus lieu de parler d’émulation musicale, à travers une amitié et une proximité entre les deux hommes que d’imitation ou de copie. D’autre part, aujourd’hui que personne ne connaît vraiment davantage (à l’exception d’Islamey) la musique de Balakirev, cette ressemblance est-elle vraiment un obstacle ?
Liapounov a émigré en France après la révolution russe et est mort à Paris, mais que savons nous précisément de sa vie en France et en quoi cela a-t-il eu une incidence sur ses compositions ?
Honnêtement, je dois avouer ne pas vraiment connaître grand-chose de la vie de Liapounov. Je connais les grandes lignes, mais j’ai très peu trouvé d’informations sur le net, par exemple. Il est effectivement parti vivre à Paris, où il est mort en 1924. Je ne sais pas dans quelle mesure cela a réellement influencé ses compositions.
Mais ce qui est certain, c’est que vers la fin de sa vie, Liapounov a tenté de s’éloigner de l’influence musicale envahissante de Balakirev. Notamment en écrivant des œuvres plus simples pianistiquement, ou destinées à la jeunesse. Une façon peut-être d’éviter certains tics pianistiques ou harmoniques de son mentor. La seule œuvre du disque issue de cette période est la 3ème Valse Impromptu Op.70.
Comme Balakirev est-il aussi méconnu pour la difficulté de ses pièces ?
Je pense que pour des pianistes qui jouent Gaspard de la Nuit de Ravel ou Petrouchka de Stravinsky, la difficulté n’est pas le réel obstacle. Bien que la plupart des œuvres de Liapounov soient extrêmement difficiles, la raison de l’ignorance dans laquelle il est tenu s’explique à mon avis davantage par un manque de curiosité singulier d’une majorité de pianistes. Ce manque de curiosité s’étend bien sur à bon nombre d’autres compositeurs qui mériteraient davantage de sortir de l’ombre. Certains voient leur chance un peu revenir (comme Alkan et Medtner ces derniers temps), d’autres ne sont encore connus qu’à l’intérieur de leur pays (comme par exemple Dohnanyi en Hongrie), pour d’autres encore, le nom n’est attaché qu’à une ou deux oeuvres
On lui a aussi reproché de s’inspirer de la musique de Liszt et Chopin , d’ailleurs votre disque dévoile des mazurkas, valses et une tarentelle… quelles en sont les caractéristiques propre à Liapounov ?
Presque toutes les œuvres pour piano issues du romantisme et post-romantisme russe remontent à Chopin et Liszt. Scriabine, Liadov, Glazounov, (pour ne pas mentionner Tchaïkovsky et Rachmaninov) ont écrit des Valses et des Mazurkas. Il n’y a là rien de bien exceptionnel –de même qu’à l’époque, l’influence européenne était très forte en Russie dans d’autres domaines artistiques.
Il est vrai que l’œuvre la plus connue de Liapounov, ses 12 Etudes Transcendantes, sont très clairement un hommage à Liszt, qui avait écrit ses 12 Etudes dans les tons bémolisés (son projet d’en écrire 24 avait été abandonné). Liapounov avait donc repris le flambeau, et en écrit à son tour une série dans les tonalités diésées. La dernière Etude est une Élégie en mémoire de Franz Liszt. Cela appuie un hommage qui n’a jamais caché la dette qu’il avait envers son prédécesseur.
La comparaison entre les Mazurkas de Chopin et Liapounov révèle surtout les différences entres ces deux approches. Chez Liapounov, les mazurkas ne sont pas regroupées en cycle de 3 ou 4, mais chaque pièce est une œuvre consistante à part entière. Les harmonies sont plus slaves que polonaises, et l’écriture pianistique est réservée au virtuose –alors que la mazurka chopinienne (ou scriabinienne) ne découragera pas un amateur d’un certain niveau.
Comment est né l’idée d’enregistrer une intégrale et savez-vous dès à présent quand sortiront les prochains volumes sachant qu’il a composé pas moins de 35 opus pour cet instrument ?
L’idée d’enregistrer ces œuvres est venue très spontanément lorsque je les ai découvertes ! Pour la plupart, il n’y avait pas d’enregistrement disponible me permettant d’entendre ces œuvres à moins de les jouer moi-même. J’ai voulu essayer de compenser ce vide (partiel) discographique.
J’ignore encore quand sortiront les prochains Volumes, mais je commence déjà à préparer le programme du suivant. J’espère d’ici un an ou deux pouvoir présenter le Volume 2 (qui comprendra vraisemblablement les Variations sur un thème russe, les Variations sur un thème géorgien et soit la Sonate, soit les grandes œuvres isolées comme la Novelette ou le Scherzo).
Ce premier disque ne comprend pas les premiers opus du compositeur mais une sélection du «recoin le moins exploré du piano de ce compositeur» à savoir les mazurkas, valses et la tarentelle pourquoi avez-vous fait ce choix ?
Etant donné que j’ignore encore quand sortiront les prochains Volumes de cette intégrale, je tenais à ce que ce Cd soit cohérent en tant que tel (en présentant l’intégrale des Valses, des Mazurkas et la Tarentelle, toutes des œuvres regroupées sous le thème de la danse). Cela me semblait préférable à présenter quelques préludes, quelques mazurkas, quelques valses. Je préférais boucler la boucle. Il y avait beaucoup de façons différentes de commencer cette intégrale. La plus logique aurait été de commencer par les Etudes transcendantes, qui sont l’œuvre la plus importante de Liapounov, mais cela n’aurait rien apporté de fondamentalement neuf, elles ont déjà été enregistrées 3 fois. Tant qu’à faire quelque chose de ‘nouveau’, autant le faire réellement. Hormis la 8ème Mazurka et dernière Mazurka, aucune de ces œuvres n’avait été enregistrée jusqu’à présent.